Au cours de mes recherches sur les récits historiques et la tradition orale, j'ai eu connaissance de cette histoire. Un Roi des Rois de la dynastie Achkâni, fort réputé, avait pour vassaux d'autres grands rois, dont la vie et le sort dépendaient. La personnalité de ce Roi des Rois était aussi capricieuse qu'un nuage de printemps ou qu'une averse de pluie. Son énergie au travail était celle d'un lion, il guerroyait comme un éléphant. Sa présence brillait dans les festins. Grand connaisseur des bons vins, il avait aussi un penchant pour les belles dames. Sur une décision de sa part, une nuit obscure pouvait se transformer en une journée ensoleillée. D'est en ouest, le monde entier était sous sa domination. Ce roi était sage et courageux, la vie lui semblait un printemps éternel.
Chaque année, lors des fêtes de Now-Rouz, il donnait un grand banquet auquel il conviait les rois des autres pays ainsi que les Grands et les nobles du royaume et des autres contrées. Étaient aussi invités les héros comme Bahrâm, Rahhâm, Gocht-Asp, Chapourguili, Cachaniril, le vaillant Virou et Zard, le demi-frère du roi qui était à la fois son confident, son conseiller et son premier ministre. Les festivités se déroulaient aussi hors du palais et de ses jardins, dans les rues et dans les prairies à l'extérieur de la capitale, ainsi que dans toutes les villes du pays, car Now-Rouz est le premier jour de l'an persan.
Lors de ces fêtes, le Roi des Rois siégeait au milieu des Grands et des plus belles dames du monde. L'atmosphère était celle d'une chasse où des lions poursuivraient des gazelles sans que ces dernières en soient effrayées et sans que les yeux des lions puissent se rassasier de regarder toutes ces beautés. Toutes les mains tenaient une coupe de vin et ressemblaient à une grande branche de narcisse. Les musiciens exprimaient leurs émotions d'une voix plaintive et les rossignols gémissaient sur les branches fleuries. Dans les jardins persans des palais, comme dans les prés le long des rivières, le vin pleuvait dans les coupes. Des convives dansaient auprès des musiciens, d'autres écoutaient les chanteurs. Tous étaient heureux, le roi lui-même manifestait sa joie. Les festivités duraient une semaine, le roi en profitait pour admirer les belles de ce monde, comme Chahrou la Châh-Banou du pays de Mâh-Abad, Abnouche Nasrine, Chirine, Mâh-Peikar, Dinâr-Giss, Zarin-Giss, Farangiss, Nâz-Delbar, Âb-Naz, AbNahid, Manijé, Yasamine, Azar-Goon et Lab-Nouch. Elles étaient ainsi des milliers de belles femmes aux bouches sucrées, parfumées de jasmin, aux lèvres de pétales de rose qui donnaient envie d'embrasser.
Présentation de l'éditeur
Fleuron de la culture persane du XIe siècle, Wis et Râmmin est l'un des plus anciens romans d'amour de la littérature. Remontant au temps préislamiques, comme en témoignent les références aux croyances et aux rituels de la religion zoroastrienne, ce récit dépeint les vicissitudes de l'amour passion, les plaisirs intenses de l'amour physique comme les affres de l'absence ou de la jalousie. Malgré les siècles qui nous séparent, son analyse des personnages est d'une étonnante modernité et sa narration des scènes d'amour n'est ni banale ni vulgaire.
Avant même qu'elle ne soit conçue, la princesse Wis fut fiancée à un prestigieux roi de la dynastie parthe. D'une beauté sans égal, elle fut d'abord mariée à son frère, puis aussitôt revendiquée par le roi des rois à qui elle avait été promise. Mais Râmmin, le noble et beau jeune frère du roi, et Wis tombent éperdument amoureux l'un de l'autre. Cet amour réciproque et longuement contrarié finit par vaincre le destin et Wis et Râmmin régnèrent heureux durant de très longues années.
Divers spécialistes européens ont souligné la probable influence de ce récit sur Tristan et Iseult, dont l'histoire le plus souvent considérée d'origine celtique, sera rédigée un siècle plus tard. Le passage dans notre littérature a pu se faire par la diffusion des oeuvres persanes et arabes vers les cours musulmanes d'Espagne et, de là, par l'intermédiaire des troubadours.
A l'inverse de la présentation exhaustive d'Henri Massé (1959), confidentielle et depuis longtemps indisponible, cette nouvelle traduction allège certains passages pour mieux donner au lecteur francophone un plaisir de lecture, sans trahir l'esprit du texte, permettant ainsi d'apprécier la culture très raffinée de la Perse antique.
Wis et Râmmin
Fakhré Aldin Assad Gorgani
Broché: 208 pages
Editeur : IMAGO (17 novembre 2010)
Collection : IMAGO (EDITIONS
Langue : Français
ISBN-10: 2849521019
ISBN-13: 978-2849521014
Dimensions du produit: 22,8 x 1,4 x 14 cm